La beauté du monde n’est pas un lot de consolation pour ce qu’on en connait de laideur, de cruauté ou d’injustice. Ce n’est pas la dorure ou le sucre d’une pilule amère, difficile à avaler. Ce n’est pas non plus un miroir aux alouettes , ni la carotte qu’on nous tend avec le bâton.
La beauté du monde n’est là que comme la fleur, venant en son temps, sans promettre d’arrêter le temps qui passe, sans non plus redouter sa victoire. Elle est là pour que l’évidence du mal ne vienne pas anéantir l’évidence du bien. Elle est là pour rappeler que le bon grain et l’ivraie pousse dans un seul et même champ. Elle n’a pas d’autre fonction que de rappeler que la vie n’est pas qu’une horreur et qu’elle est aussi une merveille et un don.
Ceux qui voient la beauté du monde n’ignorent pas ses misères et ses souffrances, ils les méprisent, non pour mépriser ceux qui en sont victimes, mais pour détester leurs malheurs et chercher à y trouver une réponse. Ceux qui voient la beauté du monde, en fait, ne sont pas aveugles, ni éblouis par la lumière, ils voient, tout simplement, la vie dans sa complexité, ses méandres, sa fragilité et sa grandeur aussi.

Ils voient un cœur en chaque être. Ils voient la grande conspiration de l’univers pour qu’il y ait la vie plutôt que le néant. Ils voient combien le comportement de l’homme sur la planète met en péril l’incroyable arborescence et floraison de la vie à sa surface. Ils voient mieux que les autres encore le poids de chaque larme, la douleur de chaque perte. Ils voient combien l’injustice est à l’œuvre et combien il faut la combattre.

La beauté du monde n’est pas une consolation, c’est une motivation et c’est une espérance. Elle n’est pas le constat béat, elle est un combat constant.
Chacun de ceux qui voient la beauté du monde, sans jamais croire qu’à lui seul, il peut la sauver, fait pourtant comme si elle ne tenait qu’à lui, qu’à son engagement et qu’à sa foi en elle. Il ne s’agit pas seulement d’un optimisme de la volonté qui viendrait contredire un pessimisme de la raison. C’est plutôt comme si la joie du cœur était capable d’étreindre sa tristesse, non pour lui demander de se taire, comme tenterait de la faire la consolation, mais pour l’aider à guérir, comme le fait un amour véritable.

La beauté du monde n’est en fait pas un état du monde, c’est un état de notre cœur qui accueille ce monde avec tendresse, avec douceur, avec amour. La beauté du monde n’est pas une consolation, c’est une guérison.

Tydé

Thierry Desbonnets