Tout le monde a vu ce masque un peu partout avant la révolte tunisienne et encore aujourd’hui pendant le mouvement égyptien ; pourtant très peu savent l’histoire de ce masque et surtout de quel mouvement il est en train de devenir l’implacable symbole. C’est en 2006 qu’un film met en image une série de bandes dessinées réalisées de 1989 à 90. Le film n’a pas eu le succès qu’il méritait, pourtant comme disent les jeunes, c’est aussi « puissant » que matrix…

Mais comment un masque tiré du film « V comme Vendetta » lui-même inspiré des bandes dessinées du même nom, devient-il le symbole, l’emblème des « anonymous », célèbre mouvement de hacker dont la franchise tunisienne autoproclamée prit une part très active sinon décisive à la chute de Ben Ali le funeste ?

Surtout quand on sait que le film, les bandes dessinées s’inspirent d’un personnage qui a lui, bel et bien, existé : Guy Fawkes, principal responsable du plan connu sous le nom de « la conspiration des poudres » qui visait pas moins qu’à assassiner un roi, sa famille et la plupart de l’aristocratie d’un coup en faisant exploser le palais de Westminster le 5 novembre 1605 lors de la session d’ouverture du parlement.

De là que jusqu’à nos jours, chaque 5 novembre est fêtée la « Guy fawkes night » au Royaume-Uni jusqu’en Afrique du sud et ailleurs… Peu importe, un peu de googlage devrait vous permettre d’en savoir plus, ce n’est pas le sujet. Le sujet étant le masque qui représente ce personnage mais qui désormais représente quiconque adhère à une philosophie de lutte qui n’a plus rien à voir avec la conspiration des poudres qui n’était en réalité qu’une Saint-Barthélemy light où un groupe d’activistes catholiques voulaient en finir avec un roi protestant.

De nos jours, ce masque représente tout à fait autre chose. Il représente la dernière forme de lutte possible contre un système quelconque quand il devient trop puissant et quasiment invincible, une sorte de big Brother, écoutant tout, conditionnant psychologiquement tout, prisonnier de sa propre mécanique au point qu’on ne puisse plus imaginer ce que serait le monde sans lui !

C’est le sujet de ce genre film qu’on appelle dystopique car c’est un « récit de fiction peignant une société imaginaire, organisée de telle façon qu’elle empêche ses membres d’atteindre le bonheur, et contre l’avènement de laquelle l’auteur entend mettre en garde le lecteur. »

A voir ou revoir absolument si vous l’avez raté en 2006 ou si vous avez cru qu’il s’agissait là d’un film pour adolescent. Pourtant à l’époque, je me souviens d’un jeune de son temps qui l’a trouvé nul ! Heureusement sinon cela signifierait qu’il est devenu non seulement adulte avant l’âge mais surtout conscient de la mécanique du monde et de l’impuissance des gens de bien…

Toujours est-il que le principe c’est de savoir comment peut-on lutter contre un système monstrueux sans passer par les formes d’organisations conventionnelles où sitôt que vous vous organisez, vous êtes découverts donc pris. Il s’agit de réfléchir à un moyen de combattre un système devenu décadent et monstrueux sans jamais se connaître mais en ayant tous le même but : faire tomber le système !

Qui peut arrêter une conspiration ourdie par des esprits supérieurs pour des gens qui ne se connaissent pas et ne se rencontreront jamais et qui chacun œuvrant de son côté n’a pour unique objectif que la chute du système ? Le combat des anonymes pour le bien de tous !

C’est là un principe révolutionnaire qui sera celui du millénaire qui commence.

Principe redoutable s’il est impulsé par des esprits brillants ayant bien pensé la dynamique et pour laquelle il ne suffira que du soutien d’autres anonymes tout aussi brillants ayant chacun la liberté d’action pour atteindre l’objectif.

Il n’y a aucune place pour la peur ! C’est le combat des désespérés lucides ! C’est le combat d’un reste de bien contre la toute puissance du mal !

Il va de soi qu’une pareille rhétorique peut être reprise par des groupuscules, des sectes, et autres pour semer la terreur ou juste renforcer le système ; c’est là qu’intervient un tout autre élément sans lequel tout le reste devient falsifiable, cet ingrédient naturel c’est la toute simple bonne foi !

C’est compter sur des anonymes en doutant quasiment de leur existence tellement vous pensez être le seul à penser ainsi pour le bien de tous, c’est compter sur la seule force de la vérité dont aucune falsification ou pâle copie ne saurait jamais atteindre la toute puissance de la force de conviction qu’elle apporte à chacun.

Un programme bien ficelé et ciao ciao tout système tyrannique…

Ça laisse rêveur…

Vlane