Le fabricant de produits d’hygiène Essity, dont l’un des principaux sites se trouve à Gien, souhaite attribuer des boîtiers à ses salariés, destinés à limiter le risque de transmission du Covid-19. Tous les syndicats s’opposent fermement à ce projet, qu’ils jugent « infantilisant » et « intrusif ».

Le projet du groupe Essity, dont une usine se trouve à Arrabloy, commune associée de Gien, ne passe pas auprès des syndicats – CFDT, CFE-CGC, CGT et Force ouvrière -, qui sont unanimes. Pour eux, il n’est pas question que les salariés de l’entreprise portent un boîtier électronique visant à leur faire respecter la distanciation sanitaire, alors que la pandémie de Covid-19 perdure.

Ce badge s’attacherait autour du cou ou à la ceinture et émettrait un son de 85 décibels dès que l’employé se rapprocherait à moins de deux mètres d’un de ses collègues.

« Sans système de géolocalisation »

Selon Marc Specque, directeur de la communication d’Essity, société spécialisée dans la fabrication de produits d’hygiène en papier, l’objectif de ce système, qui pourrait être mis en place dans plusieurs sites européens du groupe, est de « limiter le plus possible tout risque de transmission du virus » :

« Ce dispositif serait sans système de géolocalisation et non relié à des informations personnelles. Les porteurs du boîtier seraient alertés en cas de proximité physique trop importante sur les sites Essity (hors sanitaires, restaurant d’entreprise, infirmerie). Avec ce système, le référent Covid du site aurait la possibilité d’alerter des cas contacts potentiels de manière plus rapide et exhaustive.« 

« Le prétexte sanitaire utilisé par la direction est douteux« 

Les syndicats, eux, ne l’entendent pas de cette oreille. Dans un communiqué, la CFDT évoque « un système de contrôle particulièrement intrusif et infantilisant, comparable à celui qui dissuade les chiens d’aboyer ».

« Le prétexte sanitaire utilisé par la direction est douteux à plus d’un titre et laisse penser que l’équipement pourrait être utilisé à d’autres fins », ajoute la CFDT.

Les représentants syndicaux jugent également le dispositif inutile.
Pour Christine Duguet, déléguée syndicale centrale CFDT, qui travaille à Gien, « les salariés respectent déjà les normes sanitaires et nous portons le masque en permanence. » Selon elle, cette « usine à gaz ne permettra pas de gagner du temps pour retrouver les cas contacts ».

« Pour nous, il ne s’agit pas d’un moyen de prévention, mais d’une traçabilité. »

Selon Philippe Caubet, délégué syndical CFE-CGC, à Gien, « ce système n’apporte pas d’eau au moulin » :

« Des procédures sont déjà en place. Si ce dispositif était bénéfique, nous aurions peut-être pu en discuter. Mais là, nous avons clairement marqué notre désaccord.« 

Philippe Caubet affirme également qu' »il y a des zones blanches dans l’usine de Gien, ce qui rendrait difficile le fonctionnement des badges à ces endroits ».

D’après les organisations syndicales, l’entreprise Essity a déjà passé commande des boîtiers, « au mépris du dialogue social et faisant fi de l’opposition des salariés », indique la CFDT. Ce que ne confirme pas la direction.

« Les modalités de fonctionnement seraient à déterminer conjointement avec les instances représentatives du personnel, notamment au travers de groupes de travail. Le règlement général sur la protection des données de la Commission nationale de l’informatique et des libertés ainsi que l’anonymat seraient bien évidemment respectés. L’objectif unique d’Essity est de préserver la santé des collaborateurs. Des discussions sont en cours.« 

Marc Specque (Directeur de la communication d’Essity)

Pas d’entente entre la direction et les syndicats

Le 6 janvier, des réunions ont eu lieu sur chaque site, entre la direction et les représentants des organisation syndicales, qui n’ont pas trouvé de terrain d’entente. Des comités sociaux et économiques, dont les ordres du jour ne sont pas encore connus, devraient se dérouler la semaine prochaine.

Pour l’heure, les syndicats ont saisi les Directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (Direccte), comme l’explique Philippe Caubet : « Si le projet n’est pas annulé, nous pourrons éventuellement aller devant le tribunal. »

De son côté, Christine Duguet précise que l’ultime levier des salariés pourrait être la grève. « Nous ne souhaitons pas en arriver là. Mais si la direction ne nous écoute pas… »