Les temps changent. En Grèce déjà, les premières prémices du printemps modifient notre univers. Sous un soleil radieux ce matin sur Athènes, nous nous préparons pour les manifestations du jour place de la Constitution.

Mais c’est surtout depuis plusieurs semaines que le soleil des autres peuples d’Europe et du monde arrive déjà à nous chauffer. Hier notamment, c’est avec émotion que nous avons suivi les manifestations de solidarité envers nous. Un grand merci.

Les dirigeants bancoctares prononcent déjà certains mots de compassion « car c’est vrai que le peuple grec souffre », ils n’y croient pas un seul mot, mais comme ils sont sous la pression de leurs peuples, et pour certains en période électorale, il faut alors « réagir ».

Chez nous, la communauté française d’Athènes s’est également mobilisée devant le monument du soldat inconnu, et devant l’Ambassade de la République Française. En regardant les images et les vidéos, j’ai reconnu certains visages. Durant notre long « été grec » et depuis les années de Jacques Lacarrière, chemin faisant, nous avons parfois partagé, à part un verre d’ouzo, les mêmes craintes sur l’avenir du continent.

Devant l’ambassade de la Bundesrepublik Deutschland, des Allemands installés en Grèce, ont manifesté également pour faire comprendre qu’au pays de Goethe, la poétique de l’avenir ne se réduit pas aux apostrophes de Madame Merkel ou de Monsieur Schäuble.

Seulement, cette image devient insupportable pour les sinistres bancocrates. Car tout simplement elle fera voler en éclats tous les stéréotypes sur la crise, si savamment orchestrés par le pouvoir en Allemagne et ailleurs au sein de l’Union Européenne. Car l’Europe Bancocrate Allemande (E.B.A. !) qui tend à remplacer l’U.E., ne fera pas tant d’heureux même au sein du peuple allemand, processus finalement entamé depuis des années, lorsque l’écran de fumée sera dissipé cela sera alors très clair.

Mais toute image forte, à « contre-sens » traversant l’univers de notre cosmopolis des médias et de la praxis politique, nuit gravement la santé, déjà bien précaire… des CDS et des stocks options. Ainsi les policiers grecs ont reçu l’ordre de disperser cette manifestation de nos amis Allemands, il y a eu bien même des interpellations. L’acte fut justement très symbolique pour nous, les photos ont fait le tour de l’internet grec, et notre colère monte. Ne touchez pas à nos amis Allemands !

C’est aussi un signe que la répression devient de plus en plus dure. Comme avant-hier, lors de la dispersion de la manifestation des lycéens, place de la Constitution. Seulement, nous avons tous remarqué ce garçon très souriant lors de son interpellation par les policiers. Donc Papadémiens, sachez-le, regardez bien ce garçon, nous n’avons plus peur. Ce processus du désamorçage de la peur est complexe à expliquer, déjà il n’est pas linéaire et ne concerne pas toutes les couches de la population simultanément et de la même façon.

Certes, parmi ceux qui boivent leur café face à la mer dans les quartiers sud, certains pensent encore appartenir au monde de l’avant-guerre. D’autres ferment leurs yeux, baissent la tête et se coupent du monde. Un ami écrivain prétendait récemment que « les gens ont eu ce qu’ils méritaient car leur cervelle c’est de la bouillie depuis longtemps, consumérisme, clientélisme et maintien d’un système politico – économique indigne, alors maintenant ils se révoltent car on leur enlève leur bout d’os ». Mais cet ami se trompe. À travers la blogosphère grecque, à travers la télévision et dans une certaine nouvelle littérature, la dernière trouvaille des bancocrates est précisément celle-ci : « Nous sommes fautifs, donc nous payons le pot de miel vide et en plus cassé ». J’observe qu’en France, la même propagande sert toujours la même cause. Ayant l’occasion de suivre par satellite une édition du journal sur la deuxième chaine de la télévision française il y a peu, j’ai vite compris l’articulation de cette propagande.

D’abord on montre un reportage sous forme d’enquête d’investigation journalistique sur le thème de la fraude fiscale. On voit un petit patron en train de se faire prendre par les services du fisc français et de la douane, épaulés par la police. « Donc tremblez Français, vous êtes fautifs », et ainsi par la culpabilisation vous accepterez toutes les mesures actuelles, et surtout celles qui vont suivre après les élections. Le reportage suivant au même journal télévisé, montrait d’autres fraudeurs en Grèce cette fois, pour bien achever le raisonnement. « Les Grecs payent cette corruption et c’est normal », ceci sera ainsi valable pour tout le monde en Europe.

Soyons enfin lucides, la corruption réelle ou inventée chez les peuples n’a RIEN à voir avec le régime bancocrate, instauré alors, pour et par une corruption totalitaire, cette dernière est bien plus déterminante pour notre avenir culturel, économique, voire même biologique, que la fraude du petit patron français ou du promoteur immobilier athénien.

J’ai rappelé encore une fois à cet ami réticent et pessimiste que l’immense majorité de nos concitoyens est sur la corde raide, et que finalement, les plus vaillants parmi les fraudeurs, si on veut suivre ce raisonnement, restent relativement encore à l’abri.

Nous sommes heureux que le mensonge bancocrate se fissure en Europe et ailleurs, aussi grâce à vous lecteurs de ce blog. Notre printemps athénien sera long et difficile, débouchant éventuellement sur un été très chaud. Merci à vous tous, continuons ensemble, nous sommes tous prêts, mais sachons-le, le printemps des peuples n’a jamais été automatique.

Panagiotis Grigoriou