Jérémie

Durant la petite période des fêtes, je me suis amusé à essayer de lire dans la bible les prophètes que je n’avait pas encore lu… Ils sont quelques uns. Les prophètes sont des prophètes de malheur, ils crient la destruction, la peine, et l’adjuration des fautes du peuple par la pénitence. Pas étonnant que la plupart se soient fait tuer, leurs sermons ne devait pas plaire aux puissants de l’époque, et plusieurs se firent contraindre. Il en est un majeur, que pourtant la mémoire populaire n’a pas oublié, et dont je n’avait pas connaissance: c’est Jérémie.
Pour un prophète de malheur, voilà un prophète de malheur. La plupart de ses congénères maudissent Israël pour ses détours, et annoncent un malheur. Lui va maudire les autorités de son temps sur plusieurs générations de rois. Il va annoncer la déportation en Babylone pendant plus de vingt ans, jusqu’à ce qu’elle se produise. Il va regarder trois fois le roi dans les yeux, alors même qu’il est retenu, et lui répéter sa chute prochaine et terrible. Nos « jérémiades » n’ont rien ici d’un cœur tendre. Mais il ne va pas s’arrêter là! Quand enfin la déportation s’amorce, il annonce encore le malheur des juifs qui fuiront en Égypte, puis le malheur aux Philistins, a Moab,aux Ammonites, à Edom, à Damas, aux arabes, et à Babylone! On n’a jamais vu rien de tels, c’est malédictions sur malédictions, il y en a pour tout le monde, et déjà dans le récit elles se réalisent… Pourtant il y a une certaine actualité au texte, là on l’on ne s’y attend pas: Jérémie est si terrible quoi que la morale populaire ai comme souvenir de lui, car il crie la fin d’un monde. On sent dans ses ligne l’iniquité et les abus du temps, et aujourd’hui le contexte semble un peu similaire. Voyons en quoi.
Comme je l’ai dit, je n’ai rien vu en Jérémie d’aussi terrible chez ses pareils: « 
Qui est destiné à la mort, à la mort ! Qui est destiné à la captivité, en captivité ! Qui est destiné à l’épée, à l’épée ! » (Jérémie 43:11 NBS). En effet, il est lui-même terrifié par ses propres visions, et s’en plaint: « Malheur ! Epée du Seigneur, jusqu’où iras-tu, sans repos ? Rentre dans ton fourreau, sois tranquille et fais silence. » (Jérémie 47:6 NBS). Mais ce qu’il décrit est avant tout une longue chute de sa société qui atteint un point qui semble de non retour, et ici ses réflexions sont de toutes les époques ou le mal semble se rapprocher, et où chacun sent le malheur aux portes: »Car il se trouve des méchants dans mon peuple; ils épient comme celui qui pose des pièges, ils tendent un filet et prennent des hommes. Comme une cage est remplie d’oiseaux, leurs maisons sont remplies de tromperie; c’est ainsi qu’ils deviennent puissants et riches. Ils sont devenus gras, resplendissants, ils dépassent toute mesure dans le mal; ils ne rendent pas la justice, ils ne rendent pas justice à l’orphelin, et ils prospèrent; ils ne respectent pas le droit des pauvres. » (Jérémie 5:26-28 NBS). On entend ici les proverbes, qui disent: « Il est une engeance dont les dents sont des épées, dont les mâchoires sont des couteaux, pour dévorer et faire disparaître de la terre les pauvres, et de l’humanité les déshérités. » (Proverbes 30:14 NBS)
Or nous sommes dans une époques ou les disparités s’agrandissent, ou le nombre des chômeurs grandit, ou les riches continuent à amasser plus et plus malgré la conjoncture: « pourquoi la voie des méchants est-elle celle de la réussite ? Pourquoi vivent-ils tranquillement, tous ceux qui trahissent ? Tu les as plantés et ils ont pris racine; ils progressent, ils portent du fruit; tu es proche, dans leur bouche, mais tu es loin des profondeurs de leur être. » (Jérémie 12:1, 2 NBS)
Les politiques semblent impuissant, les extrêmes montent, ainsi que la dissidence: « Hurlez, bergers, criez ! Roulez-vous par terre, princes des troupeaux ! Car les jours sont arrivés où vous allez être égorgés et dispersés. Vous tomberez comme un objet de valeur. Plus de refuge pour les bergers ! Plus de lieu sûr pour les princes des troupeaux ! Entendez les cris des bergers, le hurlement des princes des troupeaux, car le Seigneur ravage le lieu où ils faisaient paître. Les pâturages prospères sont silencieux à cause de la colère ardente du Seigneur. Il a abandonné sa demeure comme un jeune lion sa tanière; car leur pays est devenu un lieu dévasté par la fureur du destructeur, à cause de sa colère ardente. » (Jérémie 25:34-38 NBS)
C’est l’Islam qui porte ce grand cri en nous, le roi du Sud, qui se révolte, et s’en prend à nous a cause de notre incapacité à refouler les problèmes sociaux que nous créons, et qui grandissent sans que le politique ne semble pouvoir les entailler. C’est un problème français, mais pas seulement, c’est tout l’Occident qui est aux prises avec les mêmes phénomènes: un soi disant situation de crise, une montée croissantes des inégalités sociales, des menaces directes sur le système, et deux camps qui montent en puissance vers l’affrontement: nos nationalistes, de chaque nation occidentales, et les fondamentaux d’une autre cultures, les islamistes. Telle est la situation que nous vivons, et il n’est pas dit qu’elle aille en s’arrangeant. Jérémie prévient quand à lui: « N’écoutez pas les paroles des prophètes qui vous disent : « Vous n’aurez pas à vous soumettre au roi de Babylone ! » Car c’est le mensonge qu’ils vous annoncent en prophètes ! Je ne les ai pas envoyés – déclaration du Seigneur – et c’est pour mentir qu’ils parlent en mon nom, afin que je vous bannisse et que vous disparaissiez, vous et les prophètes qui vous parlent en prophètes. » (Jérémie 27:14, 15 NBS).
Tout est dit, et je rejoint le prophète dans son constat et son analyse, il est des situations dont nous ne pouvons nous sortir sans crises: »C’est la tempête du Seigneur : la fureur se déchaîne, la tempête fait rage, elle tournoie sur la tête des méchants. La colère ardente du Seigneur ne s’en retournera pas, jusqu’à ce qu’il ait accompli et réalisé les projets de son cœur. Dans la suite des temps vous en aurez l’intelligence. » (Jérémie 30:23, 24 NBS). Nous pourrions revenir sur les griefs que reproche le prophète à son propre peuple, son égarement progressif par rapport à ses premières amours, par rapports à ses principes fondamentaux qu’il en vient à oublier avec le temps… Les choses sont toujours les mêmes, ni finissons par oublier nos principes fondamentaux, jusqu’à ce que la vie nous oblige par la force à les hisser demain plus haut et plus grands encore qu’hier par le conflit. Alors avec Jérémie, je pense que notre détresse est prochaine, qu’elle monte vers nous et qu’il n’y a pas de moyen de l’éviter. Qui sait faire reculer l’islamisme, l’extrémisme nationaliste, la paupérisation? Nous devons nous remettre en question, et beaucoup ont déjà commencé. En 2016, je pense, est signé l’annonce de notre déportation vers le conflit, et si la joie est dans son miroir, c’est sûrement qu’elle cherche à s’en échapper.

Tim Verhees